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L’épave du BPO de Francis Joyon retrouvée 27 ans après

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C’est une belle et grande histoire que m’a racontée Virginie Joyon, la femme de Francis, lors de la remise du Trophée Jules Verne à IDEC au musée de la Marine. Elle commence en 1990 quand Francis, encore inconnu, s’engage dans la Route du Rhum sur son cata BPO. Ce dernier, Francis l’a construit – plutôt reconstruit – seul, de ses mains, sous une tente, deux ans plus tôt en récupérant des morceaux empruntés à d’anciens multis. Ses flotteurs sont ceux de l’ancien cata Elf Aquitaine de Marc Pajot. Le bras arrière n’est autre que celui de Roger et Gallet ayant appartenu à Eric Loizeau. La poutre centrale, Francis l’a réalisée en contreplaqué et polyester. Quant au mât, il le refait à partir de trois morceaux de l’espar de Stalaven.

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A bord de ce cata assemblé comme un puzzle, Francis, âgé de 32 ans, dispute la Route de la Découverte, Cadix–Saint Domingue avant de le ramener en France en plein hiver en 14 jours. En 1990, Francis l’engage dans la quatrième édition de la Route du Rhum. Seul problème, mais de taille, il est trop long pour répondre au règlement imposé par l’UNCL. Qu’importe ! A Saint-Malo, armé d’une tronçonneuse, il lui coupe l’arrière des flotteurs, sur 3 mètres. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, l’UNCL lui impose, à trois jours du départ, un nouveau parcours de qualification, Saint-Malo-Ouessant.

Florence Arthaud Route du Rhum
Florence Arthaud à l’arrivée du Rhum 1990. Crédit : Bernard Rubinstein.

Dixième de l’épreuve remportée par Florence Arthaud, Francis n’a pas droit aux honneurs même si sa place reste un exploit si l’on se réfère à ce cata fait de bric et de broc. D’ailleurs, Francis n’est pas du genre à flâner sous le soleil antillais. Toujours en solo, au cœur de l’hiver, il reprend la route, cap sur la Bretagne. Et là, à 1 000 milles au nord de Saint-Martin, il démâte, la chute de l’espar entraînant une voie d’eau et l’abandon de BPO. Francis est recueilli sain et sauf par un bananier qui fait route vers Panama.

L’histoire aurait pu s’arrêter là. Si ce n’est que vingt-sept ans après, un mois après son retour victorieux du Trophée Jules Verne, un message arrive sur sa boîte mail. Il émane d’un jeune Québécois, Jean-François Albert, qui a découvert sur une plage déserte un tronçon de flotteur marqué d’une inscription largement effacée. L’endroit est désert : la plage de Wild Cow Run, sur l’île de Middle Caicos aux îles Turks-and-Caïcos. L’épave gît à la lisière de la plage et de la forêt. « Je n’y connais pas grand-chose écrit Jean-François, mais sans doute que ce morceau de flotteur a été déposé à la faveur d’un ouragan ou d’une tempête car cette plage est située à l’intérieur d’une barrière de corail. » En tout cas, Jean-François, passionné de kite, mène une longue enquête et pense qu’il peut s’agir de l’ancien BPO. Bingo ! La preuve que rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme.

Publié par  Bernard Rubinstein
Publié par Bernard Rubinstein
« Le dinosaure de la presse nautique », c’est ainsi que se définissait volontiers Bernard, alias Rubi ; il faut dire qu’il avait œuvré successivement dans les rédactions de Neptune Nautisme, Neptune Yachting et Voile Magazine pendant plus de 45 ans, après avoir fait ses classes sur Pen Duick VI aux côtés d’Eric Tabarly… Excusez du peu ! Trop tôt disparu (13 juin 2020), il reste pour toute la rédaction de Voile Mag un modèle de rigueur et de curiosité nautique.
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