En passant

Tout feu, tout femme

Partager :

IMG_0301Ce jour où l’on fête la gente féminine est l’occasion rêvée de rappeler le dévouement de deux femmes d’exception. L’une britannique, Grace Darling, l’autre française, la veuve d’Alexandre Matelot, gardien du phare de Kerdonis à Belle-Ile. De l’autre côté du Channel, la première a été élevée au rang d’icône. Des dizaines de livres, des tableaux, un musée à Bamburgh, dans le Northumberland, une variété de rose, des souvenirs en cristal, des porcelaines à la sauce british, à quoi vient s’ajouter un flacon de parfum à son effigie, témoignent de son acte héroïque. Elle n’a que 23 ans quand, le matin du 7 septembre 1838, elle embarque sur le canot à avirons du phare de Longstone situé sur la côte est britannique pour porter secours à huit hommes et une femme… Il fait une furie de temps. Dans la tempête, le steamer SS Forfashire, en panne de machines, vient de se fracasser à la côte, provoquant la mort d’une quarantaine de passagers. Malgré la violence des éléments, elle embarque aux côtés de son père sur le canot du phare et réussit à sauver quatre passagers et cinq membres d’équipage qui s’étaient réfugiés sur la roche. Puis ils les ramènent au phare où ils resteront deux jours.

Relayé par toute la presse de l’époque, le sauvetage de quelques membres du Forfashire va rapidement faire le tour de la Grande-Bretagne. Mais la tuberculose empêchera Grace Darling de gravir les sentiers de la gloire. Elle n’avait que 26 ans.
Côté français, c’est Madame Matelot et ses deux enfants, âgés de 11 et 13 ans, qui ont droit à une photo grand format dans la célèbre revue L’Illustration – le Paris Match de l’époque – du 17 juin 1911, complétée par un article de deux pages. Le 18 avril 1911, alors qu’il nettoyait le mécanisme de rotation dans la maison phare de Kerdonis, le gardien Matelot est pris d’un malaise et décède brutalement. Pour son épouse, il paraît inconcevable de ne pas assumer la mission de son mari : allumer le phare tout en assurant la rotation du feu. Ce qu’elle fera, aidée de ses deux enfants. Qu’importe si le mécanisme, démonté, est inutilisable. C’est en poussant la lanterne à la main durant toute la nuit qu’elle va remplir son devoir. Dans toute la France, cet acte héroïque alimente les journaux. Mieux encore, le barde breton Théodore Botrel en fera une chanson : « Les petits gardiens bretons » pour saluer le dévouement de la veuve Matelot et de ses deux enfants. Quant au ministre Charles Dumont, il lui décernera la médaille des Travaux publics. C’est dire…

Publié par  Bernard Rubinstein
Publié par Bernard Rubinstein
« Le dinosaure de la presse nautique », c’est ainsi que se définissait volontiers Bernard, alias Rubi ; il faut dire qu’il avait œuvré successivement dans les rédactions de Neptune Nautisme, Neptune Yachting et Voile Magazine pendant plus de 45 ans, après avoir fait ses classes sur Pen Duick VI aux côtés d’Eric Tabarly… Excusez du peu ! Trop tôt disparu (13 juin 2020), il reste pour toute la rédaction de Voile Mag un modèle de rigueur et de curiosité nautique.
Voir les commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *