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Charles Caudrelier : « Tout le monde peut gagner »

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On en parlait sur les pontons, l’info était dans l’air, elle est maintenant officielle : Charles Caudrelier sera bien au départ de la prochaine Volvo Ocean Race (le 4 octobre) à la barre du bateau chinois Dongfeng. Depuis Sanya, où a eu lieu le baptême du bateau, Charles répond à nos questions sur ce challenge ambitieux : non seulement réussir à bien figurer dans la prochaine course autour du monde, mais aussi former un équipage chinois pour courir au large.

Dongfeng Race Team - Official Launch Ceremony & Christening in Sanya

Depuis quand sais-tu que tu seras skipper ?
Ça ne fait pas longtemps, c’était vers la mi-janvier, c’est encore tout récent.

Connais-tu déjà ton équipage ?
Pas du tout. Douze Chinois ont été présélectionnés à l’issue d’un long processus. Ils suivent des tests physiques et psychologiques, il y a surtout des membres de l’équipe olympique de voile chinoise. Ils s’entraînent et naviguent tous les jours sur des Sun Fast.

Dongfeng Race Team - Official Launch Ceremony & Christening in SanyaCombien de Chinois seront présents à bord ?
L’idée, c’est d’avoir un projet qui ressemble à un projet chinois, car le souhait du sponsor, c’est de rendre la voile populaire en Chine. Cela veut dire au moins trois ou quatre Chinois à bord, c’est-à-dire la moitié de l’équipage.

Le media man sera chinois lui aussi ?
Je l’espère, c’est très important qu’il soit chinois pour retransmettre ce qui se passe à bord. C’est une culture différente et il faut parler chinois pour interviewer les équipiers chinois.

Et le reste de l’équipage ? Il parlera français ?
Il y aura de tout : Suédois, Néo-Zélandais, Australiens… Il y aura au moins un autre Français mais j’ai des contacts partout, des marins que j’ai croisés lors de la dernière Volvo mais aussi dans mes navigations sur des courses françaises. Ce sera un mélange mais je ne peux pas donner de noms aujourd’hui. Cela ne sera pas le même équipage que sur Groupama, pas les mêmes Français en tout cas, sauf si Franck Cammas veut bien se joindre à nous sur une étape mais vu son planning, cela risque de ne pas être possible.

Barre2As-tu un objectif sportif sur cette épreuve ?
Bien sûr, je ne me présente pas au départ d’une course sans espoir de victoire mais avec la moitié de l’équipage qui est issu de l’olympisme et qui n’a pas de culture maritime, il est difficile de prétendre faire un équipage vainqueur. D’ailleurs, personne n’y croit vraiment, sauf nous peut-être… La monotypie ouvre quand même le jeu : nous avons tous le même bateau et donc, au départ de chaque étape, tout le monde peut gagner. Nous ne sommes pas les favoris sur le papier, et mon objectif est d’abord de faire progresser cet équipage afin que lors de la prochaine édition, un équipage entièrement chinois puisse se présenter au départ. Mais j’aimerais bien remporter au moins une étape …

Quels sont tes adversaires les plus sérieux ? Abu Dhabi ?
Oui, le skipper d’Abu Dhabi en est à sa troisième Volvo d’affilée, et la deuxième avec la même équipe. C’est une équipe très forte. Il y a aussi SCA, les filles se préparent depuis un an et demi avec un entraînement hyper complet et des gens très compétents. Elles ont de gros moyens, elles font des tests avec deux bateaux et elles seront plus nombreuses à bord, c’est très important pour le sommeil et la récupération. Elles ont vraiment beaucoup d’atouts dans leur jeu. Et puis on annonce aussi un équipage néo-zélandais qui serait forcément très dangereux mais c’est difficile de faire le tri entre toutes les rumeurs. A priori, il ne reste que deux bateaux disponibles et davantage d’équipes sont sur les rangs. Aucune n’a encore le budget complet, il y aura peut-être des regroupements, des équipes qui fusionneront.

On a l’impression que tout le monde se met en route tardivement par rapport à la date de départ : le 4 octobre, c’est bientôt !
C’est vrai mais il faut considérer deux facteurs pour expliquer cela. D’une part le contexte économique que tout le monde connaît : il est extrêmement difficile de trouver un budget. D’autre part, le fait que la course se dispute à bord de monotypes. Les bateaux ne sont tout simplement pas disponibles : la capacité de produire est limitée et les bateaux ne sont pas prêts. Les budgets sont inférieurs mais il n’y a pas de bateau existant, le vrai bilan ne pourra être fait qu’à la prochaine édition.

Il y a de grosses différences de performances entre ce monotype et les Volvo 70 de la précédente édition ?
Absolument, les performances seront inférieures, il n’y a pas de doute là-dessus, de l’ordre de 10 à 15%. Les bateaux sont plus petits mais aussi moins puissants. On sera plus proches des 60 pieds du Vendée Globe.

Le tour du monde en solitaire reste l’un de tes objectifs ?
Bien sûr, le Vendée reste un objectif auquel je n’ai pas renoncé mais si je ne décroche pas un sponsor assez vite pour y aller, c’est foutu. Il faut avoir un bateau disponible suffisamment tôt. Comme j’ai envie d’y aller pour gagner, cela passe par un nouveau bateau. Pour bien faire, vu mon investissement sur la Volvo, il faudrait que je confie cela à des gens très compétents  – ils existent – qui s’occupent du projet et de la construction du bateau en mon absence. Ce n’est pas irréalisable et je garde cela en ligne de mire pour être prêt à passer en mode solitaire après la Volvo.

Tu t’es installé en Chine ?
Je suis là-bas pour encore quelques mois et ensuite nous emmènerons le bateau par la mer jusqu’à Auckland, ce qui correspondra à une étape de la Volvo et nous permettra de valider les choix d’équipage et en même temps de nous entraîner. Ensuite, nous aurions aimé continuer le voyage vers l’Europe par la mer mais le temps risque de nous manquer et le bateau ira sans doute par cargo jusqu’aux Etats-Unis.

Tu as l’intention d’apprendre le chinois ?
Pourquoi pas ? J’aimerais bien, notre avenir est peut-être un peu chinois. Autant lors de mon premier passage à Sanya (en course à bord de Groupama, ndlr) je n’avais pas tellement été attiré, autant là, je suis mordu. Je travaille tous les jours avec des Chinois, c’est un peuple et un pays qui sont fascinants. J’aime bien cette culture et je pense que cela va être un jeu que de réussir à parler un peu chinois. A bord, nous pourrons sûrement échanger quelques mots et ils apprendront sans doute aussi des expressions françaises. Mais l’anglais sera la langue principale de communication.

Les deux Sun Fast d'entrainement de l'équipe chinois Dongfeng, devant Sanya.
Les deux Sun Fast 3200 d’entraînement de l’équipe chinoise Dongfeng, devant Sanya.
Publié par Loïc Madeline
Journaliste à Voile Mag de fin 1999 à 2015, Loïc a été adjoint puis Rédacteur en chef avant de partir vers de nouveaux horizons. Venu de la presse généraliste, écrite et télé, c’est un journaliste dans l’âme, rigoureux et passionné.
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