Régates et courses

« La Mini se gagne plus contre soi-même que contre les autres » Benoît Marie

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_jva589918 jours, 13 heures et 1 minute. Ce qui représente une moyenne de 8,25 nœuds sur les 3 700 milles de cette (maxi) Mini-Transat. Benoît Marie est le grand vainqueur de la course à bord d’un bateau qui en est à sa quatrième participation et à sa seconde victoire. Une victoire surprise, tant elle semblait depuis quelques jours promise à Giancarlo Pedote qui a fait pratiquement toute la course en tête à bord de Prysniam (l’ancien bateau de David Raison, vainqueur de la précédente édition sous le nom de TeamWork). Mais Benoît, qui voulait cette victoire, n’a rien lâché et a toujours cru en sa bonne étoile. Sur un parcours particulièrement long (l’escale aux Canaries a été supprimée), il a su tirer le meilleur de son plan Finot-Conq et attaquer à bon escient sur la fin du parcours. Benoît  revient avec nous sur sa course quelques heures après son arrivée…

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Comment te sens-tu ?

Je suis arrivé vachement reposé, étonnamment j’ai pas mal dormi avant l’arrivée, je ne suis pas trop en manque au niveau du sommeil mais mon corps a souffert.

Avant le départ, tu nous disais : Je pense que j’ai mes chances, il ne sert à rien de partir battu…

Au fond de moi j’y croyais vraiment. Une course comme ça c’est différent des entraînements, des petites courses, c’est très long, ça se joue à l’usure. Je savais que j’étais un dur à cuire, j’étais conscient de la qualité de mes adversaires comme Bertrand Delesne ou Giancarlo qui ont déjà fait la transat mais il y en avait plein d’autres, le plateau est relevé : Gwénolé, Julien, Arthur, je savais que ça allait être très dur mais la Mini se gagne plus contre soi-même que contre les autres ; je savais que cette course était importante pour moi, j’avais une telle envie de la faire !

Le bateau s’appelle benoitmarie.com : ça veut dire que tu n’as pas de sponsor ?

Ça veut dire que j’ai 37 partenaires mais pas de sponsor titre ; des partenaires qui ont contribué pour quelques centaines ou quelques milliers d’euros à ma course. C’est un handicap car je devais tout faire par moi-même ; il était hors de question de pouvoir s’appuyer sur un préparateur ou de payer un chantier. Cela veut dire travailler le soir, la nuit, même si j’ai beaucoup de copains qui m’ont aidé. Heureusement je n’ai pas fait l’impasse sur les voiles. J’ai beaucoup travaillé sur mon jeu de voiles pour partir avec une garde-robe parfaite.

Tu n’as pas le bateau le plus jeune ni le plus rapide ? Ses qualités ? Ses défauts ?

Son gros défaut, c’est son ergonomie qui est incroyablement dure, voire mauvaise… ce bateau est très dur à vivre ! Ses qualités c’est qu’il a quelque chose de magique, il a atteint la perfection sur plusieurs points de fonctionnement. A un moment donné, le bateau te dit : tu peux attaquer comme un fou. Ça m’est arrivé de tenir plus de 15 nœuds de moyenne pendant quatre heures d’affilée. Le bateau me parlait, il volait sur sa quille ! Il est peut-être un peu moins raide, un peu plus lourd que d’autres mais tu peux le pousser dans ses retranchements et il va vraiment te parler, te permettre d’allumer. Au vent arrière il va aussi vite que les autres, dès qu’il plane il va bien, il n’a pas à rougir de sa vitesse.

A quoi attribues-tu ta victoire ? Chance, préparation, hargne, bateau ?

J’ai fait une assez bonne préparation, j’ai énormément travaillé, j’ai été le premier à l’eau dans la saison, dès le 10 février j’ai commencé à m’entraîner avec Gwénolé (Gahinet), à faire des offshores quand le thermomètre marquait deux degrés, j’avais une envie qui était exceptionnelle. Ça m’a poussé dans mes retranchements, j’ai mené le bateau comme jamais et ça a payé. Après je n’ai pas cassé parce que je suis parti avec une idée claire dans ma tête : la course à mon rythme. Je l’avais inscrit au-dessus de la descente avec MON en majuscule. Il  faut s’écouter : je ne le sens pas, je n’allume pas. Par exemple, c’était trop chaud au cap Finisterre, le vent faisait des pointes à 29 nœuds, j’ai décidé d’affaler. Sur la VHF, j’entendais les autres qui parlaient de départ en vrac et de bout-dehors qui cassaient, ça m’a mis en confiance. Bien sûr il y a des moments comme la nuit avant l’arrivée où j’ai appuyé comme un âne, mais parce que je sentais que je pouvais le faire. A d’autres moments, je n’ai pas cassé car je n’ai pas appuyé. J’avais toujours ça dans la tête : préserver mon bateau.

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Traverser l’Atlantique en une seule étape, ça change quoi ?

La transat en une étape c’était différent : je n’y étais pas préparé, c’était compliqué à gérer. On s’est demandé si ce n’était pas trop : 3 700 milles c’est impressionnant, c’est un gros morceau, t’es pas fier au moment de quitter le ponton. A l’échelle de nos petits bateaux, c’est quasiment un Vendée Globe ! Après j’en ai tiré profit, car sur la première partie de la course j’ai cassé mon bout-dehors et ça m’a servi de leçon. Dans ce sens ça m’a servi ; et puis j’ai conscience d’être un dur à cuire et j’étais sûr que je resterais mobilisé.

Publié par Loïc Madeline
Journaliste à Voile Mag de fin 1999 à 2015, Loïc a été adjoint puis Rédacteur en chef avant de partir vers de nouveaux horizons. Venu de la presse généraliste, écrite et télé, c’est un journaliste dans l’âme, rigoureux et passionné.
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