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Une météorite est tombée sur la Transquadra

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Ils sont plusieurs concurrents à l’avoir vu, cet objet céleste et fulgurant qui a traversé le ciel au-dessus de la flotte, quelques jours avant l’arrivée des premiers bateaux en Martinique. Le récit de Luc Fourichon (JPK 10.10 Nauti-stock.com) est plutôt édifiant :

« D’un seul coup j’ai vu les voiles s’éclairer, je me suis dit tiens qu’est-ce que c’est, il doit y avoir un bateau qui nous éclaire, et puis je vois le truc traverser le ciel. Beroki aussi ils l’ont vue, ils disent même qu’elle est tombée près de leur bateau. »

Allons donc voir chez Beroki (Un Sun Fast 3200). En effet, ils sont encore plus catégoriques. Arnaud Treny raconte :

« D’abord j’ai vu vu un truc lumineux dans le sillage, à quelques mètres derrière le bateau. La lumière a disparu tout de suite, comme si elle coulait. Ensuite, on a vu passer une sorte de projectile, à basse altitude ; il y avait de la lumière verte assez forte. Et le truc a plongé dans l’eau à environ 200 mètres du bateau. C’était comme une fusée éclairante, mais tirée d’en haut. A part des débris cosmiques, je ne vois pas ce que ça pouvait être. »

Intervention impromptue d’Antoine Croyère, depuis le bateau voisin, qui lance à mon attention : « Méfie-toi, c’est des Basques, y vont essayer de te raconter n’importe quoi ». A quoi Michel Farina réplique : « C’est vrai que l’extra-terrestre qui est descendue de l’OVNI, elle était pas mal ». Pas toujours facile d’avoir des conversations normales avec des concurrents de la Transquadra juste après leur arrivée, surtout quand on parle de météorite.

Sur le JPK 110 Ederlezi, Jean-François Harlet raconte la même histoire : « Une lumière bien verte, avec une trajectoire bien parallèle au sol ».

Et sur le Sun Fast 3200 Coeur de Chauffe, on confirme aussi la présence de cet objet volant pas vraiment identifié… Mais passons à des considérations plus terre à terre (si l’on peut dire).

Comment optimiser le rating d’un JPK 10.10, par Gérard Quenot

Le co-skipper de Luc Fourichon (« c’est lui le spécialiste de la jauge », paraît-il) nous a expliqué sa recette, avec les tenants et aboutissants d’une réflexion qui semble très poussée – et d’ailleurs très payante puisque Nauti-stock.com va sans doute remporter l’étape et le classement général. Une des clés de la victoire de ce JPK 10.10 réside en effet dans son rating savamment optimisé – de fait, le bateau est jaugé à 0,995 alors que l’A31 Victoria, son principal adversaire, est à 1,001. Six millièmes d’écart, c’est environ deux heures sur une transat entre Madère et la Martinique, or Victoria n’avait que quatre minutes d’avance (en temps compensé) sur Nauti-stock à l’arrivée à Madère, et un peu plus d’une heure d’avance en temps réel à l’arrivée en Martinique – pas assez.

« En gros, il y avait trois questions à résoudre : quelle quille [avec ou sans bulbe, ndlr], quel mât, et combien de safrans. Mais pour commencer, on a commencé par se demander : quel bateau ? Je regardais surtout les A31 et les les JPK 10.10. L’A31 a une particularité, c’est qu’il a très peu de stabilité de formes [d’où son rapport de lest assez généreux, ndlr], très peu de surface mouillée, et que du coup il va très vite dans le petit temps. Le JPK nous paraissait plus polyvalent, plus facile, et a priori plus à l’aise dans la brise, alors que l’A31 est en principe moins stable dans la brise, au reaching et au travers, voire aussi au portant. Ensuite, il fallait choisir la quille. Nous avons fait le calcul suivant : le bulbe serait surtout avantageux sur la première manche, et beaucoup moins sur la seconde ; or ça fait quand même 6 ou 7 millièmes. Et puis de toute façon, le point fort de ce bateau, ça reste sa stabilité, même sans le bulbe. Dans les surfs, on peut facilement abattre presque jusqu’à la fausse panne pour garder le spi gonflé, et relancer quand on arrive en bas de la vague. Le bulbe est sans doute intéressant en solitaire, d’ailleurs Vicariot en a un… Cela correspond à un équipier au rappel. Mais en double c’est moins évident. »

Et Luc de renchérir :

« Des fois ça fait un peu peur, parce que ça va vite, tu es à 14-15 noeuds, il y a un mur d’eau de chaque côté, mais mais en tout cas le bateau est sur des rails, il est super stable ».

Gérard poursuit :

« Pour le mât, on a fait un peu le même raisonnement [sachant que la différence de rating est du même ordre que pour le bulbe, ndlr] » : il y aurait eu un bénéfice dans la première étape, mais à peu près aucun dans la deuxième – et la deuxième est nettement plus longue… Donc on a pris de l’alu, mais peint en noir pour tromper l’ennemi ! Pour les safrans, c’était plus simple, JPK [Jean-Pierre Kelbert, le constructeur, qui avait remporté la dernière édition de la course sur un 9.60, ndlr] nous a dit qu’il en fallait deux, que c’était un peu plus compliqué à régler mais que c’était mieux pour contrôler le bateau ».

Titou va bien ou presque

Et puisque l’on parlait d’A31, on a revu avec plaisir la sympathique – et souriante – baleine blanche imprimée sur la coque de La Baleine blanche – le bateau de Jean-Baptiste L’Ollivier alias Titou. Le skipper solitaire, qui s’était blessé au coccyx dans une collision avec une baleine il y a quatre jours, est arrivé sans encombre au Marin. A le voir embarquer difficilement sur son bateau ou descendre à l’intérieur de façon quelque peu laborieuse, on se dit quand même que ces derniers jours n’ont vraiment pas dû être des vacances, d’autant que le Finistérien n’a pas tant ralenti suite à cet accident malheureux pour lui et pour cette baleine (celle-ci était sans doute endormie, d’après lui). « Ouais, à la fin j’avais quand même renvoyé de la toile, vu que ça allait un peu mieux avec les anti-inflammatoires et les antalgiques, admettait-il en arrivant au ponton hier matin. Mais j’ai passé quelques heures sous grand-voile seule. » En tout cas, Titou nous ramène une vidéo prise sur le vif qui pourrait vite faire un carton sur YouTube (pour la baleine, c’est à partir de 9’00).

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Publié par Sébastien Mainguet
Sébastien a œuvré à Voile Magazine de 2000 à 2015, aux essais mais aussi très souvent aux sujets équipement dont il s’est fait le spécialiste. Il a notamment été longtemps la cheville ouvrière de notre hors-série annuel dédié à l’équipement.
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